Quelles sont les tendances au sein des différents types de presse ? Les défis actuels ? Comment se présente l’avenir ? WE MEDIA tend l’oreille. Wim Troch, Rédacteur en chef chez Visie, la plateforme d’information multimédia d’ACV, CM et beweging.net, nous offre un regard actuel sur le segment C&C, qui représente les innombrables magazines de membres dans notre pays.
Le nombre de titres dans le segment de la ‘Community & Cultural Press’ a-t-il augmenté ou plutôt diminué ces dernières années ?
Suite à l’augmentation des prix du papier et l’inflation en général, beaucoup d’éditeurs et d’organisations ont dû imaginer des solutions créatives pour brider les coûts. Certains l’ont fait en sabrant dans le nombre de numéros ou de pages. D’autres sont passés complètement au numérique pour toucher leurs lecteurs. Des titres auront sans doute aussi disparu complètement, mais cela ne me semble pas être la grande masse. Une ligne de communication directe avec leurs membres est essentielle pour les organisations. C’est un atout sur lequel la plupart des organisations continuent à miser.
Dans ce segment, aussi, s’opère un glissement des investissements vers le numérique. Cela a-t-il entraîné un élargissement du lectorat ?
Là où, par définition, les éditions papier présentent l’avantage de savoir dans quelles boîtes aux lettres elles aboutissent, les publications digitales ont, quant à elles, l’avantage de pouvoir toucher un nouveau public. Par contre, un magazine papier compte aussi des ‘co-lecteurs’. Il n’y a pas que l’abonné qui lit le magazine, mais aussi ses proches ou des visiteurs. Le print et l’on-line se complètent joliment. Certains préfèrent lire en format digital, d’autres privilégient le papier. C’est surtout une question de préférences personnelles et de comment chacun organise sa vie. Il est toutefois indéniable qu’un site Web et les médias sociaux offrent des possibilités supplémentaires pour qui veut mettre en exergue son nom de marque, son produit ou son message, aussi auprès d’intéressés potentiels ou de passants occasionnels. C’est précisément pour cette raison que, ces dernières années, Visie a fortement investi dans un site Web, une newsletter et les médias sociaux.
Quelle stratégie les magazines de membres adoptent-ils grosso modo pour leur présence en print et celle en digital ?
Sur les médias sociaux, vous renoncez partiellement au contrôle. Cela vous offre toutefois une belle occasion de diffuser votre contenu à grande échelle et de séduire un nouveau public. Vous pouvez également rebondir plus rapidement sur l’actualité. En ligne, vous pouvez aussi proposer votre contenu sous plus de formes : un article, un reportage vidéo, une infographie, un épisode de podcast. Par canal de médias sociaux, vous pouvez même présenter votre message de manière différente et, au besoin, l’adresser à un autre public cible.
À leur tour, les reportages vidéo offrent une expérience émotionnelle complètement différente au téléspectateur-lecteur. Sans doute les jeunes générations sont-elles devenus davantage des téléspectateurs que des lecteurs. En print aussi, nous consacrons d’ailleurs plus d’attention aux images qu’avant. Il ne faut toutefois pas perdre de vue le fossé numérique. Un groupe assez important – qui ne se limite vraiment pas aux plus de 80 ans – ne se sent pas à l’aise pour consommer des informations en ligne. Le print reste donc essentiel en 2023 aussi pour qui veut diffuser son message et entretenir un lien avec son public cible.
En général, y a-t-il des changements notables en print, par exemple en termes de périodicité et de tirage des titres ?
Il est probable que tous ceux qui ont besoin de papier pour leur communication ont fait beaucoup de calculs l’an dernier. On produit évidemment moins de volume, mais la puissance du papier, que ce soit sous forme de magazine, de folder, d’affiche, de lettre, etc., reste énorme. Le fait que les gens se sont saisis de ce papier est incroyablement important pour les organisations.
Quels sont actuellement les grands défis pour qui publie un magazine de membres ?
Les coûts d’impression et d’envoi élevés ont toujours été un défi, et cela ne changera probablement jamais. Le volet en ligne n’est cependant pas exempt de soucis non plus. Il y a par exemple l’incertitude quant à qui rencontrera vos articles sur les médias sociaux et la mesure dans laquelle ils seront lus. Vous êtes à la merci des algorithmes de Facebook, Twitter et consorts. Des algorithmes qui, en outre, peuvent totalement changer du jour au lendemain. Il est très difficile de construire un public fidèle en ligne. De même, il n’est pas facile de diffuser des messages plus complexes. Le print reste mieux adapté à cet égard. Trouver l’équilibre entre le print – et son prix de revient plus élevé – et l’on-line – avec sa volatilité – est sans doute le défi numéro un de beaucoup d’éditeurs.
Quel rôle les éditeurs C&C peuvent-ils jouer dans le débat autour de la durabilité, notamment au niveau de la diffusion de leurs titres, généralement imprimés à grand tirage ?
Il faut assurément que l’on y réfléchisse. Le papier peut être recyclé, l’encre utilisée actuellement n’est plus aussi polluante qu’il y a, disons, trente ans et certaines imprimeries font tourner leur presses à l’électricité verte. Les titres à grand tirage peuvent certainement mettre la pression sur les imprimeries pour continuer à innover et investir dans la durabilité. Il y a toutefois aussi toujours les camions qui transportent les magazines vers les centres de distribution et les bureaux de poste. Il est indubitable qu’il y a encore du pain sur la planche. La numérisation peut apporter une réponse partielle.
Y a-t-il enfin quelque chose de propre, de spécifique aux titres C&C ?
Les magazines de membres sont énormément importants pour forger un lien. Ils peuvent faire en sorte que naisse un sentiment commun. Entre membre et organisation, mais aussi entre les membres eux-mêmes. Les magazines de membres constituent un point d’ancrage dans une affiliation. C’est le moment par excellence où vos membres entrent en tout cas en contact avec votre organisation ; c’est via votre communication que les membres savent qu’en tant qu’organisation vous œuvrez pour eux. Plutôt que de céder aux pièges à clics sensationnels et à la méprise polarisante du jour, les magazines de membres apportent le calme, la profondeur et un sens de communauté.
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